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Un festival gaming fait ses premiers pas à Bordeaux

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Le week-end du 11 et 12 octobre, le 33 Place des Capucins accueillait le tout premier CritiqueJeu Gaming Festival. Retour sur un événement qui a attiré plus de 3 000 personnes et qui pourrait bien ancrer la métropole girondine dans le paysage eSport français.

Difficile de passer à côté, dans le quartier des Capucins. Écrans géants, clameurs de foule et ambiance électrique : pendant deux jours, le jeu vidéo s’est emparé de la Place des Capucins, transformée en arène géante pour l’occasion. Une première à Bordeaux, qui ne manquait pas d’ambition.

Un pari bordelais assumé

À l’initiative de cette première édition : CritiqueJeu, média consacré à l’univers vidéoludique. Objectif affiché par Paul Lenglet, son fondateur : « démontrer que le Sud-Ouest peut aussi devenir une terre d’eSport ». Un défi de taille dans une région où les événements gaming de cette ampleur restent rares, contrairement à Paris, Lyon ou Lille qui accueillent régulièrement des compétitions d’envergure nationale.

Le programme s’articulait autour de cinq tournois majeurs, dont certains dotés de récompenses conséquentes. Le plus prisé, la League of Legends Amateur Series, offrait ainsi 3 000 euros au vainqueur – les Crustacés Volants, formation locale qui n’a pas manqué de galvaniser son public. La Team Akira, venue de Toulouse, repartait quant à elle avec 2 000 euros après sa victoire sur Valorant, tandis que des joueurs venus de Nantes et La Rochelle complétaient le palmarès sur Super Smash Bros Ultimate et Rocket League.

L’animation était assurée par Ken Bogard et Nono, deux figures du streaming français qui ont su créer une atmosphère digne des grands rendez-vous internationaux. Leurs commentaires énergiques, ponctués d’analyses tactiques précises, ont maintenu l’attention aussi bien du public présent sur place que des milliers de spectateurs connectés en ligne. Sur Twitch, la retransmission a d’ailleurs cumulé plus de 8 500 vues, un chiffre encourageant pour une première édition.

Un public varié, loin des clichés

Sur place, le public reflétait la diversité actuelle de la scène gaming. Des familles côtoyaient les habitués des LANs, des étudiants en école d’informatique discutaient stratégie avec des quadragénaires nostalgiques. « Je ne m’attendais pas à voir autant de monde différent », reconnaît Lina, 19 ans, venue accompagner son frère. « Et surtout, zéro agressivité. C’était plutôt sympa. »

Cette mixité générationnelle et sociale constitue sans doute l’une des réussites majeures du festival. Loin de l’image parfois caricaturale du gamer isolé dans sa chambre, l’événement a mis en lumière une communauté ouverte, accueillante et désireuse de partager sa passion. Les organisateurs avaient d’ailleurs fait le choix d’une entrée gratuite, facilitant l’accès au plus grand nombre.

Plus qu’une compétition, une célébration culturelle

Au-delà des compétitions diffusées en direct, le festival proposait un espace retrogaming particulièrement apprécié. Consoles des années 80 et 90, bornes d’arcade, cartouches poussiéreuses : un véritable voyage dans le temps qui a séduit les visiteurs de tous âges. Les plus jeunes découvraient avec étonnement les graphismes pixelisés de leurs aînés, tandis que ces derniers retrouvaient avec émotion les sensations de leur adolescence.

La section dédiée aux studios indépendants de Nouvelle-Aquitaine offrait également une vitrine précieuse aux créateurs locaux. Plusieurs développeurs ont pu présenter leurs projets en cours, échanger avec le public et même recruter des beta-testeurs. Une opportunité rare dans une région où l’industrie du jeu vidéo peine encore à atteindre la visibilité des pôles parisien ou lyonnais.

Le concours cosplay du dimanche a constitué l’un des moments forts du week-end. Une vingtaine de participants ont défilé sur scène, costumes confectionnés à la main, certains nécessitant plusieurs mois de travail. La reproduction d’un personnage de Zelda: Tears of the Kingdom a particulièrement marqué les esprits, témoignant du talent et de la minutie des passionnés présents.

Des débats qui posent les bonnes questions

Les tables rondes organisées en marge des tournois ont également trouvé leur public. Les discussions sur l’avenir de l’eSport en France, la création de jeux indépendants et l’éthique dans le streaming ont attiré plusieurs dizaines de personnes, avides de comprendre les enjeux d’une industrie en pleine mutation.

Ces conférences ont permis d’aborder des sujets rarement évoqués dans les événements grand public : la précarité des joueurs professionnels, les difficultés de financement des studios indépendants, ou encore les dérives potentielles du marketing d’influence. Des échanges de qualité qui ont contribué à donner une dimension réflexive à un événement qui aurait pu se contenter du spectacle.

Des ambitions déjà affichées pour 2026

Côté chiffres, l’organisation revendique 3 200 visiteurs sur deux jours, près de 500 participants aux différents tournois et vingt-deux exposants. Des résultats encourageants pour les équipes de CritiqueJeu, qui annoncent déjà vouloir reconduire l’événement l’année prochaine, avec un format élargi. Paul Lenglet évoque notamment l’ajout de nouvelles disciplines et la création d’un espace professionnel dédié aux studios régionaux.

Cette volonté d’expansion témoigne d’une certaine confiance, mais soulève aussi des questions. Le modèle économique du festival, basé sur la gratuité et le sponsoring, sera-t-il soutenable à long terme ? La métropole bordelaise dispose-t-elle des infrastructures nécessaires pour accueillir un événement de plus grande ampleur ? Autant d’interrogations auxquelles la prochaine édition devra répondre.

Reste à savoir si Bordeaux parviendra à s’imposer durablement sur une scène eSport française déjà bien établie ailleurs. Mais pour une première, le pari semble en tout cas tenu. Le CritiqueJeu Gaming Festival a démontré qu’il existait un public, une envie et un potentiel dans le Sud-Ouest. À suivre.

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