Robert E Howard (1906–1936) est l’un des écrivains pulp les plus influents du XXᵉ siècle par sa contribution au magazine Weird Tales. Créateur de Conan le Cimmérien, de Kull et de Solomon Kane, son influence se ressent dans l’imaginaire un siècle plus tard.
Le magazine Weird Tales était le terrain de jeu d’un trio d’auteurs entre les années 20 et les années 30. Ce triumvirat comprenait Lovecraft, Howard et Smith, trois noms dont les créations sont toujours référencées, bien que les deux premiers disparaissent très tôt et que le troisième abandonne l’écriture par la suite.
La vie courte, mais marquante de Robert E Howard
Robert E Howard comme on le connaît ou Robert Ervin Howard est né 1906 au Texas. Au début du XXe siècle, l’État demeure encore marquée par son passé lié au Far West et ses légendes. Comme ses deux comparses, Howard est un autodidacte et un lecteur insatiable qui se lance très jeune dans l’écriture.
Il trouve son terrain dans les magazines pulp. Leur lectorat et les conditions lui permettent de jouer avec des récits courts, mais percutants. Il s’y fait aussi un ami avec qui il va correspondre pour échanger des idées : Howard Phillips Lovecraft, le papa de Cthulhu. Robert contribue au Mythe de ce dernier avec de nouvelles entités dont certains habitent aussi le monde qu’il lance au début des années 30.
En effet, en 1932, Robert E Howard publie The Phoenix on the Sword dans Weird Tales. Il s’agit de la première histoire de Conan le Barbare : l’un des personnages les plus importants de la fantasy. Si l’Aragorn de Tolkien a défini l’archétype du rôdeur, Conan en a fait de même pour le barbare. Et il n’est pas le seul héro iconique de l’auteur, avant Conan, Howard avait un autre barbare, Kull et un justicier puritain, Kane.
Malheureusement, la carrière d’Howard est brève, à peine une dizaine d’années. S’il ne traverse pas les difficultés psychologiques de son ami Lovecraft, le créateur de Conan est accablé par des drames personnels qui le poussent au suicide en 1936. Il n’avait que 30 ans. Sa disparition affecte profondément ses comparses.
Kane, Kull et Conan, les trois héros de Howard
La force de Robert E Howard tient pour beaucoup dans ses personnages. Ainsi, ses trois protagonistes clés sont Kane, Kull et Conan. Des héros très différents dans leur mentalité et qui montrent la capacité de Howard à écrire des récits d’aventures passionnantes avec une touche philosophique.
Solomon Kane, fanatique, mais héroïque
Solomon Kane est le premier dont on publie les récits en 1928. Kane est puritain anglais du XVIe siècle, grand et maigre, il voyage à travers le monde toujours habillé de son inquiétante tenue noire, armé d’une rapière et d’un pistolet, parfois aussi d’un bâton magique africain. C’est un personnage paradoxal.
Robert E Howard nous le présente de manière assez antipathique, d’autant plus que Kane est un fanatique religieux. Il se considère comme l’instrument de la punition divine. Pourtant, il œuvre pour le bien avant tout, il venge et protège le sinnocents sans rien y gagner, libère les esclaves et met même ses convictions religieuses de côté pour coopérer avec des païens, notamment son ami, le sorcier africain, N’Longa. Ses récits lui font affronter des bandits, des guerriers et même des vampires.
Kull, le roi barbare philosophe
Contrairement à ceux de Kane, les récits de Kull ne se concentrent pas sur l’action. Le protagoniste est un roi barbare atlante qui règne sur la Valusie, un territoire dont il a réalisé la conquête. Publiés à partir de 1929, les histoires de Kull se concentrent donc plutôt sur les réflexions du protagoniste.
En effet, c’est assez rare pour le souligner, mais avec Kull le conquérant, Robert E Howard propose des récits introspectifs dans un monde de sword & sorcery. Dans The Mirrors of Tuzun Thune, le roi dépressif va voir le magicien sous les conseils d’une esclave. Là, il contemple son reflet dans un miroir et questionne qu’est-ce que la réalité.
Conan, la consécration de Robert E Howard
L’originalité des récits de Kull ne lui permettent pas de devenir populaire auprès du grand public. Ainsi, il a fallu attendre le prochain barbare pour que la fantasy de Howard prenne vraiment racine. En 1932, on découvre le personnage à présent classique de Conan : un barbare comme Kull, mais ses aventures sont sous le signe de l’aventure, à l’instar de celles de Kane.
Héros un peu dur, mais rusé et intelligent, Conan est le parfait protagoniste pour des récits pulp. Le succès est donc immédiat pour le Cimmérien au point de devenir probablement la plus grande contribution de Robert E Howard à la fiction. Et ce malgré le fait qu’il n’apparaisse finalement que dans une vingtaine de récits entre 1932 et 1936. Il revient sur le devant de la scène même après le décès de son créateur.
Howard dans la culture populaire
Howard connait une résurrection éditoriale dans les années 1950 et 1960. Ses œuvres sont réédités, notamment sous la forme d’anthologies illustrées par Frank Frazetta. Le dessinateur est celui qui façonne la représentation moderne qu’on a de ces personnages, notamment Conan. Ce dernier, puis les autres héros de Howard passent dans la culture populaire.
En dehors de la bande dessinée chez Marvel, Conan a des films iconiques avec Arnold Schwarzenegger au début des années 80. Ses comparses n’ont pas autant de chance au niveau des adaptations. Kull reçoit un film médiocre en 1997 qui suit l’ascension du conquérant tandis que Kane est adapté en 2009 dans un film apprécié par certains et détesté par d’autres. En dépit de l’intrigue de ses récits, Robert E Howard ne passe pas facilement des pages à l’écran.
Mais là où son influence se ressent notamment, c’est dans le jeu de rôle. En effet, Howard figure dans l’Appendice N de Donjons & Dragons, les sources d’inspiration recommandées pour du pulp. Conan demeure la référence, l’archétype du barbare avec aussi ses jeux de rôle officiels. Kane quant à lui façonne l’archétype de l’inquisiteur fanatique et apparaît dans ses jeux de plateau. On attend toujours que la même justice soit faite pour Kull dans un jeu de sword & sorcery solo contemplatif avec un journal en solo.
