DnD 5e et Daggerheart se font face dans l’arène des jeux de rôle avec le lancement de ce dernier le 20 mai. Tous les deux centrés sur la fantasy moderne, ils proposent deux approches différentes.
Lorsque Critical Role annonce qu’ils préparent un système de jeu, les discussions sur le Net les mettaient directement en rivalité avec WotC. Une réaction en réponse au contexte d’alors : le scandale OGL. La comparaison n’était toutefois pas encore possible jusqu’à la sortie de ce fameux jeu chez Darrington Press.
En surface, deux jeux de fantasy modernes
Dès les premières images, Daggerheart allait opter pour une représentation de la fantasy similaire à la version 2024 de la 5e édition de DnD. Ainsi, tous les deux proposent principalement des mondes colorés et inclusifs. Il n’y est pas rare pour des créatures de différentes races de cohabiter pacifiquement, sans autre remise en question.
Par ailleurs, le terme de « race » est remplacé par d’autres mots. Si DnD 2024 a opté pour « species », dans Daggerheart, on parle d’« ancestry », afin de respecter les sensibilités modernes sur la question. Cette philosophie est présente dans les mécaniques où le choix d’une appartenance ne donne plus que quelques bonus superficiels, le poids de la customisation se retrouve surtout dans les choix des classes au fil des niveaux.
Les principales différences mécaniques de DnD 5e et Daggerheart : d20 vs 2d12
À propos des niveaux, DnD 5e a un plafond au niveau 20 pour les PJ tandis que Daggerheart s’arrête à 10. Pourtant, malgré cette différence, les premiers retours comme chez supposent que chaque montée de niveau dans le jeu de Critical Role offre plus d’options, peut-être trop pour certaines tables. En dehors du multiclass, Donjons & Dragons a une progression plus linéaire.
Afin de gérer ces options, Daggerheart emploie des cartes à jouer. Bien qu’elles restent optionnelles pour jouer au jeu, elles le rendent plus accessibles et plus interactifs, au même titre que les jetons qui circulent durant la partie. DnD se contente de sa fiche personnage.
Mécaniquement, ils tournent aussi sous des systèmes bien distincts. Ainsi, DnD 2024 reprend son éternel système d20 + modificateur contre un seuil de réussite à dépasser tandis que Daggerheart utilise un système de 2d12 + modificateur contre un seuil de réussite à dépasser. Plus qu’un choix esthétique, ils ont des nuances mécaniques.
Narration ou équilibre des 3 piliers?
Sauf décision du meneur, la résolution de DnD 5e est binaire tandis que celle de Daggerheart est fondamentalement nuancée. Les deux dés, l’espoir et la peur, de ce dernier permettent quatre résultats possibles : « Non, et… » ; « Non, mais… » ; « Oui, mais… » et « Oui, et… ». Ils se traduisent par des meta currency. Ceux-ci permettent au MJ de corser la situation ou au joueur de s’offrir des opportunités en les dépensant.
Le système de Daggerheart offre donc un meilleur contrôle sur l’histoire, il s’agit avant tout d’un jeu narratif. Un fait d’autant plus renforcé par la forme de cloche des probabilités : le 13 sortira plus que tout autre résultat, les joueurs ont donc une meilleure idée de leur chance de réussite. En revanche, DnD a un système plus volatile où la probabilité reste la même pour tous les résultats. Il est plus « gamey », partiellement encore ancrée dans le wargame et les trois piliers de l’exploration, du combat et des interactions sociales.
Des univers bâtis et à bâtir : forces ou faiblesses pour DnD 5e et Daggerheart?
Partiellement, car tous les deux visent à présent un public moderne. Celui-ci trouve ses inspirations dans la culture populaire. Ils veulent plus de Critical Role, les animes ou encore de MCU que de la fantasy classique ou pulp.
En conséquence, ces jeux laissent les meneurs façonner leurs univers. Daggerheart n’a pas d’univers pré-défini, à la place, le livret de base contient une typologie d’univers (fantasy, grimdark, …) avec des variantes de règles. DnD 2024 inclut Greyhawk, cependant, il fait plus office d’exemple, de même que les Forgotten Realms, des clins d’œil à l’héritage du jeu qui semble plutôt chercher à s’en libérer.
Cette question d’ancienneté a aussi son impact sur DnD 5e et Daggerheart. Ainsi, si d’un côté Donjons & Dragons jouit déjà de sa fanbase de dizaines de millions de joueurs et de cinquante ans de contenus, il y a des attentes par rapport à ce qu’est DnD. WotC ne peut pas faire certains changements sans froisser une partie des rôlistes. Ce qui arrive à chaque nouvelle édition.
Daggerheart trouve surtout sa fanbase dans celle de Critical Role et n’a pas un an d’existence au compteur. Il a moins de contenu, moins de joueurs et une réputation à bâtir ; il faudra des années pour qu’il parvienne à pérenniser sa présence au sein de la scène des JDR. Actuellement, il fait surtout office d’alternative à DnD sur les forums, mais la compétition est rude pour ce titre.
Accessibilité et prix
Financièrement, Daggerheart surpasse son rival. L’essentiel de Daggerheart, le Core Set disponible depuis le 20 mai et le 3 juin chez certains revendeurs, va chercher aux environs de 55 euros. Pour ce prix, un rôliste a le livret de base et toutes les cartes nécessaires. La version numérique à 45 euros vient avec une intégration sur le VTT Demiplane.
Pour DnD 5e, un prix similaire à Daggerheart ne couvre qu’un ouvrage. Or il faut au moins 2 à 3 trois livrets pour vraiment profiter du jeu : le manuel du joueur et le livret du meneur sont essentiels et peut-être le bestiaire. C’est sans compter le prix des nombreuses extensions, inégales en qualité, mais qui peuvent rendre certaines options obsolètes. Le prix d’une inscription à DnD Beyond n’est pas inclut avec les PDF, de même que les modules VTT.
Les ouvrages de DnD 5e 2024 et de Daggerheart se valent sur le plan de la qualité. Mais le public a une préférence pour Darrington pour les illustrations. Aucune suspicion d’IA, plus intéressantes à regarder, clin d’œil aux 10 ans de Critical Role,… Elles ont une personnalité que le jeu de WotC a perdu, mais il s’agit d’un avis très subjectif.
Opter pour DnD ou Daggerheart révèle finalement des préférences de chacun. Si leurs cibles peuvent sembler similaires, les différences sont bien plus nombreuses que les points communs. Il est réducteur de limiter le jeu de Darrington à une réponse ou une alternative à celui de WotC. C’est un nouveau JDR de fantasy, narratif qui invite les joueurs à raconter des histoires dans le style de l’équipe de CR, là où Donjons & Dragons demeure Donjons & Dragons, LA référence en jeu de rôle.
Laquelle se retrouvera à votre table de jeu?