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Créer un monde de JDR captivant, un guide pour partir sur de bonnes bases

Créer un monde de JDR captivant à l'encre de sa plume

Créer un monde de JDR captivant, c’est pratiquement un rêve pour de nombreux meneurs. C’est toutefois loin d’être évident.

En voyant le travail des grands noms de l’industrie du jeu de rôle, on est souvent envieux de leurs talents. Des scénarios de Seth Korkowsky aux univers en expansion d’Ed Greenwood (Les Royaumes Oubliés) et, surtout, en passant par les décors vivants de Matthew Mercer et autre Julien Dutel, ce n’est pas l’inspiration qui manque aux meneurs.

Créer un monde pour son JDR, un travail captivant, mais de longue haleine

Les fondations : apprendre des maîtres…

Cependant, on ne réalise pas toujours que pour arriver à créer un monde captivant pour son JDR, il faut du travail et de la méthode. Pire encore ! En écumant les forums, les interviews et les ouvrages, on ne trouve pas quelle est LA réponse définitive pour parvenir à de tels résultats. Le seul point commun entre les créateurs célèbres, c’est de l’avoir fait.

En effet, la base d’un tel défi reste au final la pratique. Rome n’a pas été construite en un jour et finalement, c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Ainsi, pour créer son monde, il faut écrire, il faut dessiner, il faut peindre, il faut sculpter….Qu’importe. L’essentiel est de concrétiser petit à petit l’univers.

Au fur et à mesure des récits de vos joueurs durant les parties de JDR, l’accumulation de ces inventions va créer un monde unique et captivant. Rien n’oblige d’ailleurs les auteurs à enfermer ce monde aux campagnes de jeux de rôle. En fait, il serait même préférable qu’en tant que meneur vous l’exploriez en dehors de l’espace et de la période qu’ils traversent.    

C’est une pratique connue chez des auteurs de références. Tolkien a tracé de grandes cartes de la Terre du Milieu. Il en est de même pour Georges R.R. Martin avec le style du chroniqueur incertain de l’écriture de Fire & Blood. Une illustration plus récente, le mangaka Oda est célèbre pour raconter plus ou moins directement l’évolution du monde de One Piece, y compris quand les protagonistes ne sont pas présents.

En bonus, ces « explorations » permettent de créer de nouvelles pistes pour les aventures futures des PJ. Nous y reviendrons en parlant des « fronts », mais ils sont de potentiels fusils de Tchekhov.

… et créer son propre bagage pour son monde captivant de JDR

Un piège (ou à ce stade un meme), c’est que chaque meneur qui crée son monde va pomper dans toute la fiction existante. Si s’inspirer du travail de ses pairs et de ses prédécesseurs n’a rien de honteux, il y a des limites. L’heroic fantasy, en particulier, souffre de copier presque exactement l’univers du Seigneur des Anneaux sans réaliser tout le potentiel de la mythologie européenne.

En conséquence, faire un minimum de travail de recherche n’est pas de trop. Que ce soit un peu d’histoire, d’anthropologie, de linguistique, de sociologie ou, pourquoi pas, d’économie, ouvrir un ouvrage de vulgarisation de sciences humaines va loin pour éviter de créer des univers superficiels ou stéréotypés.  

Les informations collectées peuvent aussi servir pour créer un élément captivant du monde du JDR : le bestiaire. Ce recueil de créatures constitue une ressource indispensable pour certains jeux. C’est le cas de Vaesen qui profite grandement de la connaissance de son auteur de la mythologie scandinave.

Il en est de même pour les mécaniques qui peuvent être faites sur mesure pour coller avec le monde. La légende des 5 anneaux exploite intelligemment la philosophie de Miyamoto Musashi pour son gameplay.       

L’art d’archiver, d’organiser et d’utiliser ses références

Il faut cependant organiser tous les détails autour du monde fictif au fur et à mesure qu’elles s’accumulent. Au besoin, il faut aussi pouvoir consulter facilement et aisément ce lore, que ce soit en cours ou non de partie.

L’importance de centraliser son univers     

Dans ce registre, les évolutions technologiques contribuent à faciliter le travail pour créer un monde captivant pour son JDR. En effet, les auteurs peuvent bien sûr travailler avec des feuilles et des cahiers s’ils aiment cela, mais ils peuvent aussi utiliser des logiciels et des applications.

Le format le plus simple, c’est de les organiser dans différents classeurs ou différents dossiers sur un disque dur. L’étape supérieure, ce sont les logiciels comme World Anvil qui permettent de classer et connecter les différents éléments d’un lore. Avec des frises chronologiques, des cartes, des arbres généalogiques, les meneurs ont tout ce qu’il leur faut.

Pour que le monde soit captivant, il ne suffit pas de le créer, il faut surtout l’exploiter pour le JDR. Après tout, si les joueurs n’en découvrent rien, à quoi bon ? Pour ne pas s’y perdre, il faut ici aussi faire preuve d’organisation.

Il existe différentes techniques, mais une manière méthodique vient d’un jeu bien connu : les fronts de Dungeon Worlds. Le système de fronts de ce jeu PbtA est plus une manière de travailler qu’une mécanique de jeu. Il est, en quelque sorte, le devoir de maison du meneur de jeu, les préparations à faire entre les sessions.

En résumé, le MJ va prendre du temps en dehors des parties pour préparer les évènements à venir. Il s’intéresse à ce qui se passe ailleurs. Le meneur couche sur papier les dangers qui guettent ou attendent les protagonistes en créant des factions, leurs agents, leurs objectifs, en listant leurs actions et leurs impacts sur l’univers. De cette manière, le monde évolue de manière organique.

Créer puis jouer son univers en JDR : l’épreuve du feu d’un monde captivant

Cependant si l’exercice en soi est déjà un plaisir, il ne suffit pas. En effet, pour que le monde soit captivant, il faut aussi créer des liens entre ces fronts et les PJ (on reste dans un JDR après tout !). Pour cela, le meneur peut compter le plus simplement du monde sur les PNJ pour en discuter avec les avatars des joueurs.

Une approche plus interactive : si l’univers du jeu le permet, la presse constitue un véhicule immersif d’informations. Les jeux du style de l’Appel de Cthulhu ou de Cyberpunk font déjà bon usage de ces accessoires.  

Réciproquement, les actions des personnages joueurs doivent avoir un impact sur l’univers. Cela ne se résume pas à être des héros qui sauvent le monde chaque semaine, mais aussi à de plus petits échos. One Piece et Full Metal Alchemist en sont de bons exemples : des personnages rencontrés, sauvés ou simplement évoqués ressurgissent plus tard sur le chemin des protagonistes.  

Les joueurs : à la fois alliés et adversaires de l’univers d’un meneur

Si tout ce travail de la part du meneur contribue à créer un monde captivant par sa cohérence, le JDR a un petit aspect chaotique et pourtant essentiel : les joueurs. En effet, ceux-ci ne constituent pas des spectateurs comme le sont les lecteurs ou les téléspectateurs. En fait, ils sont aussi acteurs de l’histoire et architectes de l’univers. Plusieurs approches existent sur comment gérer la question.

Créer un univers captivant : la méthode des JDR à narration partagée

Dans le meilleur des cas, le meneur va travailler en harmonie avec les joueurs. En d’autres termes, ces derniers vont ajouter leurs propres éléments avec l’accord du premier : lieux, factions, personnages….

Le risque ici, cependant, c’est que les visions ne soient pas nécessairement compatibles. Un joueur qui veut intégrer toute la société japanisée de son background dans un monde viking, par exemple, est une recette pour un RPG Horror Story.

Une astuce qu’on peut emprunter à certains jeux de rôle d’horreur (Kult Divinity Lost) est d’utiliser un « contrat ». Plus qu’un document formellement signé, il s’agit d’un accord oral entre tout le monde à la table pour raconter une fiction cohérente dans sa logique comme dans son ambiance.

La méthode des écrivains-architectes

Une alternative est de pratiquement couper les joueurs de la phase de création en dehors des PJ. Dans ce cas, c’est au meneur d’avoir leur accord pour leur assigner de la famille et des amis, etc.

Au risque de mettre les joueurs sur des rails, cette méthode permet de tisser une histoire plus serrée. Il est en effet plus facile pour le meneur de tracer des liens plus intrinsèques sans l’interférence des joueurs. De plus, ce secret permet de semer des surprises pour ces derniers à la manière de la révélation de Vador à Luke Skywalker.

Enfin, il faut comprendre une nuance essentielle. Créer un monde captivant pour un JDR n’est pas forcément synonyme de créer un monde totalement réaliste. Il doit juste être cohérent avec lui-même. Les mythologies ne sont pas d’accord sur les faits d’armes des héros, Lovecraft n’a jamais unifié son mythe dans ses romans, les comics ne cessent de changer le statu quo et Dragon Ball est pratiquement au sommet des mangas malgré que son auteur improvisait au fil de semaines.

Tous ces exemples montent que les auteurs peuvent briser le lore sans que cela rende leur œuvre moins intéressante. Alors, imaginez, inventez, mais n’oubliez jamais que l’essentiel est d’abord de s’amuser.       

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